Histoire d’occuper le terrain…
Par Hugues Gonnot
À l’heure où tous les constructeurs multiplient les versions, l’écart entre la G35 et la Q45 devenait flagrant. Il devenait urgent de le combler afin de détourner une partie de la clientèle des BMW 540i, Mercedes E500 et autres Lexus GS 430. Sauf que le seul produit qui pouvait y parvenir commençait un peu à dater. Qu’importe. En traversant l’océan Pacifique, la Nissan Cima japonaise est devenue, depuis l’année dernière, l’Infiniti M45.
Carrosserie
La M45 date d’une autre époque, pas si lointaine, rassurez vous, où Nissan faisait de bonnes voitures, mais sans âme. C’était avant la reprise par Renault et l’avènement de Carlos Ghosn. Pour être franc, les lignes de la M45 sont pataudes et portent clairement l’héritage d’une lignée de haut de gamme japonais ultraconservateurs depuis plus de trois décennies. Heureusement, depuis, ils ont cassé le moule ! Le coffre est quelque peu décevant : son volume est loin de celui des meilleures voitures de la catégorie et il n’y a aucune possibilité de transformation, pas même de trappe à skis.
Habitacle
Le meuble de bord est repris sans modifications de la Q45. La disposition des commandes est un peu déroutante au début, mais elle est logique, donc on s’y habitue vite. La M45 embarque moins de « gizmos » électroniques que ses concurrentes allemandes, ce qui peut toujours rassurer une certaine partie de la clientèle effrayée par trop de technologie. L’équipement est particulièrement complet : phares au xénon, sièges avant chauffés et ventilés, toit ouvrant électrique, moniteur de pression des pneus, chaîne audio Bose de 225 watts avec changeur six CD entre autres. Le choix d’option se compose d’un ensemble comprenant le système de navigation associé à un régulateur de vitesse intelligent. Grosse déception au niveau de l’habitabilité : la M45 est l’une des plus longues de la catégorie et l’une des moins habitables. Le poids des ans ! Au moins, la finition est excellente et le choix des matériaux, réussi. Les sièges avant sont confortables, mais manquent un peu de soutien latéral.
Mécanique
Une belle pièce que ce V8 ! Repris sans modifications de la Q45, il est l’attrait numéro un de la voiture. S’il n’offre pas encore le velouté d’un V8 BMW, il reste souple, puissant et disponible à tous les régimes. La boîte automatique à cinq rapports est parfaitement étagée. Par contre, les rétrogradations forcées sont parfois un peu hésitantes et le mode séquentiel défie la logique. En passant du mode automatique vers le mode manuel, le quatrième rapport est systématiquement sélectionné, quelle que soit la vitesse, et la boîte ne repasse pas automatiquement sur le premier rapport à l’arrêt du véhicule. On a vu mieux. Les freins sont parfaitement dimensionnés pour la voiture. La direction, quant à elle, est idéalement calibrée pour la route, mais se révèle assez lourde en manœuvres. Infiniti n’a jamais entendu parler des directions à assistance variable ?
Comportement
Infiniti a visé le compromis entre le confort et la sportivité. Le compromis est réussi : la M45 absorbe bien les irrégularités, se montre stable en ligne droite et neutre en virage.
Conclusion
Une façon comme une autre de tenir le fort en attendant l’arrivée de la remplaçante d’ici deux ans. La M45 est dépassée au niveau de la ligne et de l’habitabilité, mais elle compense par un moteur très agréable et un équipement fourni. Son prix concurrentiel permettra à son acheteur d’avoir un V8 pour le prix de certaines concurrentes 6 cylindres. C’est juste, d’autant que la valeur de revente, essentielle dans ce créneau, ne sera pas à la hauteur des ténors de la catégorie. Au moins, Infiniti s’est fixé des objectifs de vente plus que raisonnables… preuve que même elle, n’est pas totalement convaincue.
Forces
Bon moteur Rapport prix/équipement excellent
Faiblesses
Esthétique dépassée Habitabilité réduite
Philippe Laguë 2e opinion
Cette grosse berline fade est sans doute la meilleure voiture pour un patron d’entreprise désireux d’adopter un profil bas : avec la M45, l’anonymat est garanti. Mais cette fois, Infiniti a poussé le bouchon un peu loin. Qui a envie de payer plus de 60 000 $ pour une voiture ressemblant à une Chevrolet des années 80 ? Pas grand monde, si l’on en juge par le très petit nombre d’exemplaires qui circulent sur nos routes. Si au moins elle compensait en proposant un agrément de conduite relevé, mais non : sa conduite aseptisée distille l’ennui. Certes, elle est confortable, bien assemblée, rapide et sans doute fiable, comme la plupart des japonaises; mais elle aussi inodore, incolore et sans saveur qu’un verre d’eau.