Audi R8
Symbole de maturité
Par Michel Crépault
Récemment, je peinais à expliquer la différence entre la marque Audi et ses rivales BMW et Mercedes-Benz. Alors que celles-ci jouissent de personnalités fortes, Audi me paraissait timide. Mais depuis la nouvelle A6, porteuse d'une fluidité de style et d'une sophistication convaincantes, cette timidité a cédé le pas à une assurance croissante. Un récent sondage auprès de collègues a d'ailleurs renforcé cette impression. À la question "quelle voiture achèterais-tu si l'argent n'était pas un problème?", plusieurs m'ont répondu A8, S6 ou RS 4. J'aurais posé cette question auparavant et jamais je n'aurais obtenu ces réponses. Or, voilà qu'Audi en remet avec la R8, sa première vraie supercar!
Carrosserie
En 2003, Audi a présenté au Salon de l'auto de Francfort le concept Le Mans quattro, un prototype qui donnait déjà une bonne idée de la version de série dévoilée pour la première fois au Mondial de l'automobile l'automne dernier [2006?] . La R8, la version de production, porte le même nom que le bolide vainqueur des 24 heures du Mans. L'usine de Neckar-sulm n'en produira que 20 par jour. Le châssis en aluminium Space Frame, léger mais robuste, est quasiment taillé à la main. La R8 est la première Audi à moteur central. Une idée géniale d'un certain Ferdinand Porsche, dans les années 30, qui procure une stabilité idéale grâce à une répartition de poids plus efficace (44 % à l'avant et 56 % à l'arrière pour la R8). Le moteur est visible de l'extérieur grâce à un hayon en forme de blason et une option permet d'illuminer la nuit la pièce d'orfèvrerie, éblouissant carrément les passants. Autre option lumineuse: les lumières LED (diodes électroluminescentes) à l'avant et à l'arrière. Non seulement durent-elles plus longtemps que les ampoules conventionnelles, mais leur petite taille a permis aux designers de s'éclater. Par exemple, les réflecteurs reprennent la forme de l'Opéra de Sydney et leur abri cristallin imite le plus bel œil de rapace jamais greffé à une voiture! Une signature visuelle unique. Cela dit, la palme de la coquetterie de la R8 revient aux panneaux latéraux surnommés The Blade. Ils viennent de série dans une couleur légèrement différente de celle de la coque mais, en option, on peut leur donner l'aspect du métal brossé, de la fibre de carbone ou bien de la carrosserie.
Habitacle
Grâce à un empattement supérieur à celui d'une Lamborghini Gallardo ou d'une Porsche 911, la R8 propose un intérieur biplace spacieux. Les deux baquets s'inclinent pour loger des objets derrière les appuie-tête, mais on fera mieux de se rabattre sur le coffre, situé à l'avant, lequel s'accommode encore mieux des bagages Audi dessinés sur mesure. Le volant aplati au bas est caractéristique des sportives et facilite l'accès. Les cadrans techno égaient un peu une cabine autrement plutôt sévère. Les sièges inspirés de la nouvelle TT font l'affaire, mais des baquets optionnels ne traverseront malheureusement pas l'océan. Les conducteurs corpulents auraient détesté ces sièges qui vous emprisonnent. Avec une transmission manuelle ou une R-tronic séquentielle (les deux à six rapports), la console centrale est surmontée d'un superbe pommeau d'aluminium ouvragé. La tige de la manuelle se déplace sur une échelle métallique, à l'italienne. Maniez-la avec entrain et le choc métal contre métal rythmera les changements de rapports. Le levier de la boîte automatique est en fait un joystick qu'on pousse vers les signes + ou -. Mais le véritable plaisir se vit avec les palettes montées au volant, qui demeurent constamment en contact avec nos doigts, tournant avec la direction. Ceux qui s'offusquent de voir Audi offrir autre chose qu'une boîte manuelle doivent comprendre que la tendance aux transmissions séquentielles greffées au volant ne fait que s'amplifier, même chez Ferrari. Ces merveilles dernier cri ne cessent de se sophistiquer et les pilotes les plus expérimentés les adorent parce qu'elles les aident à décupler leurs réflexes. D'ailleurs, les vainqueurs des 24 heures du Mans passaient ainsi les vitesses de leur R8.
Mécanique
Non, il ne s'agit pas du V10 de la Gallardo! Plusieurs y ont songé puisque Audi contrôle Lamborghini. À ce sujet, d'ailleurs, les dirigeants d'Audi jurent que les deux exotiques n'ont rien en commun, si ce n'est quelques éléments de la suspension. La R8 utilise en fait un V8 FSI (injection directe) de 4,2 litres et de 420 chevaux, disposé longitudinalement juste devant l'essieu arrière. Il permet de passer de 0 à 100 km/h en 4,6 secondes et d'atteindre une vitesse maximale de 301 km/h. À régime élevé, le piston parcourt plus de 24 mètres par seconde, changeant de sens environ 275 fois! Au moins 90 % du couple est disponible à partir de 3 500 tours par minute. La R8 est munie d'un contrôle électronique de la stabilité (ESP) programmable en modes standard ou sport. Sur un circuit fermé, le bon pilote pourra désactiver tout le bataclan, y compris l'antipatinage. Les disques d'acier peuvent être remplacés par des disques de céramique, plus légers et plus endurants. Dans le piston des amortisseurs circule un fluide dit magnétorhéologique (à retenir pour impressionner). Il s'agit d'une huile synthétique contenant de microscopiques particules magnétiques en suspension. L'application d'une tension électrique génère un champ magnétique qui modifie l'orientation des particules. Elles se mettent en travers de l'huile et entravent ainsi l'écoulement dans les canaux des pistons: l'amortisseur devient subitement plus ferme. Le conducteur n'a qu'à choisir entre un mode agressif ou confortable.
Comportement
Comme le moteur huit cylindres de la R8 est plus plat qu'un moteur traditionnel, il est proche de la chaussée, tout comme la transmission, baissant ainsi le centre de gravité. Ajoutez-y l'équilibre dû au positionnement du moteur central et la traction intégrale quattro et ce n'est pas étonnant qu'on se retrouve avec une voiture aussi stable. Plus besoin de sortir votre chronomètre: l'ordinateur de bord mesure les tours de circuit! Après vous être donné à fond, vous obtiendrez votre meilleur temps, le moins bon et la moyenne. L'autre joujou de la R8: le Launch Control. On active le mode S et on désactive l'ESP. On enfonce les pédales de frein et d'accélérateur en même temps. L'électronique choisit alors le régime moteu