À côté de la cible
Par Philippe Laguë
À l’origine, la S80 se voulait une rivale des meilleures berlines allemandes. Dans les faits, elle se compare plutôt aux ternes berlines de luxe japonaises, en plus cher et en moins fiable. Ne cherchez pas plus loin les raisons de son insuccès.
Carrosserie
Lors de son introduction, il y a cinq ans, la S80 a pris le relais de la S90 (ex-960), avec laquelle elle n’a rien en commun, si ce n’est l’écusson de la marque sur la calandre. Les stylistes des studios californiens de ce constructeur ont fait fi de la tradition en accouchant d’une berline aux lignes fluides et arrondies, qui combinent élégance et efficacité aérodynamique (coefficient de traînée de 0,28). La partie arrière, plus sculptée, contribue à rehausser le tout. Naguère réputées pour leur style conservateur et leurs formes très carrées, les Volvo figurent désormais parmi les plus belles voitures de l’industrie automobile. Qui l’eût cru ?
Habitacle
Il en va de même pour la présentation intérieure, qui tranche nettement avec l’austérité qui était naguère le propre des réalisations de la marque. Cette fois, c’est du meilleur goût et le manque de rangement sur la console est le seul reproche que l’on peut adresser à l’habitacle qui, autrement, brille de tous ses feux. Quant à la tradition scandinave, elle n’a pas que des mauvais côtés, bien au contraire; en plus de l’aspect pratique, le confort et la sécurité ont forgé la réputation des constructeurs suédois. Ainsi, les sièges de la S80 se situent parmi ce qui se fait de mieux à l’heure actuelle. Non seulement leur confort est-il exemplaire, mais ils procurent un soutien lombaire de premier ordre tout en maintenant leurs occupants bien en place. L’habitabilité légendaire des Volvo est également au rendez-vous tandis que la malle arrière est tout simplement caverneuse. L’équipement de série est pléthorique, tout comme la panoplie de sécurité, active comme passive. Bref, c’est une Volvo.
Mécanique
Avec son 6-cylindres en ligne de 2,8 litres vitaminé par deux turbocompresseurs, la T6 possède les ressources nécessaires (268 chevaux) pour rivaliser avec les V8 des Audi A6, BMW 540 et Mercedes E500, cibles avouées de la S80. La version de base se contente d’un 6-cylindres atmosphérique de 2,9 litres qui ne présente aucun intérêt. D’accord, il tourne en douceur et dans le plus grand silence, mais il manque cruellement de caractère malgré une puissance convenable (194 chevaux). Rien à voir avec les 6-cylindres de BMW et les V6 de Mercedes et Audi. La lenteur de la boîte automatique ne fait rien pour arranger les choses.
Comportement
C’est au chapitre du comportement que la S80 déçoit le plus. Des deux versions offertes, c’est la T6 qui fait meilleure figure grâce à une direction à assistance variable, des pneus plus performants ainsi qu’une boîte automatique adaptative munie d’un mode séquentiel. Attention à l’effet de couple, car il est assez brutal, merci. Disons-le, la T6, c’est un moteur, et rien d’autre. Ses aspirations sportives sont freinées par une suspension mollassonne et une direction surassistée, anesthésiant ainsi toute sensation. De plus, son important rayon de braquage m’a fait tiquer lors de certaines manœuvres. En revanche, cette bourgeoise n’a rien à envier à personne en matière de confort et de douceur de roulement, ce qui, du reste, ne surprend guère d’une Volvo.
Conclusion
Dans sa livrée de base, la S80 n’offre rien d’exceptionnel, si ce n’est la grande sécurité qu’elle garantit. Ce n’est pas rien, certes, mais ses rivales germaniques n’ont rien à lui envier à ce chapitre. Sinon, elle est d’un ennui mortel à conduire et c’est à peine mieux avec la T6. En aucun temps elle ne constitue une menace pour les Audi, BMW et Mercedes. Quant à la fiabilité légendaire des Volvo, elle tient de la légende, justement…
Forces
Chef-d’œuvre esthétique Superbes sièges Habitacle spacieux et cossu Performances solides (T6) Confort exceptionnel
Faiblesses
Moteur qui manque de caractère (de base) Boîte automatique paresseuse Agrément de conduite mitigé Version de base sans intérêt Fiabilité à la baisse
Nouveautés
Aucun changement majeur
2e opinion Benoit Charrette
Quelques légers changements pour la S80 en 2004 qui seront à mon avis insuffisants pour redonner un second souffle à cette berline qui en a bien besoin. Les acheteurs qui sont prêt à débourser plus de 50,000$ pour une voiture désirent également une expérience hors de l’ordinaire au volant. À ce chapitre, la S80 est d’un ennui mortel. Si autrefois, Volvo pouvait se permettre d’être triste à conduire en se vantant d’être la plus sécuritaire, cette affirmation ne tient plus la route aujourd’hui. Tous les concurrents offrent un niveau de sécurité comparable et une expérience au volant fort supérieure.