L’ennemi intérieur
Par Philippe Laguë
La Sentra est à Nissan ce que la Corolla est à Toyota : une berline compacte solide, confortable, qui vous transporte du point A au point B sans encombre… L’achat cartésien par excellence. Sauf que Nissan n’a pas une image de marque aussi forte que Toyota, de sorte qu’il se vend deux fois plus de Corolla. Et ce n’est sûrement pas parce que la Corolla a plus de charme !
CARROSSERIE
Le style est particulier, audacieux même. On aime ou on n’aime pas, mais au moins, la Sentra passe moins inaperçue. Chez Nissan, on a visiblement compris qu’avec des rivales comme la Civic et la Mazda3, il fallait désormais faire preuve d’audace en matière de style. Je vous laisse le soin de décider si c’est beau…
HABITACLE
À l’intérieur, toutefois, il y a zéro audace. C’est même triste. La piètre qualité des matériaux n’aide en rien : les plastiques durs qui recouvrent la planche de bord et la console évoquent ce qui se faisait de pire chez GM et Chrysler il y a dix ans. L’assemblage montre également quelques lacunes. Rien de grave, certes, mais des choses qu’on ne voit pas dans une Honda, une Mazda ou une Toyota.
L’habitabilité déçoit elle aussi. L’espace pour les jambes à l’arrière est restreint. Sinon, il n’y a rien à redire sur le plan ergonomique : tout est à la bonne place, les commandes sont d’une utilisation intuitive, et il y a des espaces de rangement là où il en faut (bien qu’ils contiennent peu). À l’avant, les sièges procurent un bon maintien, et la mollesse du rembourrage plaira à certains.
MÉCANIQUE
Le cœur d’une automobile, c’est son moteur. Or, à ce chapitre, la Sentra, comme les autres véhicules de la marque, est bien nantie. Cette motorisation est bien servie par la boîte de vitesses à variation continue Xtronic, qui ne lui enlève rien de sa vivacité. Cette boîte optimise la puissance et le couple à tous les régimes, de sorte que la Sentra est nerveuse comme elle ne l’a jamais été, et son moteur ronronne doucement à 2000 tours par minute entre 100 et 120 km/h sur l’autoroute. Ce 4-cylindres de 2 litres brille aussi par sa souplesse et sa discrétion. De la belle et bonne mécanique, indiscutablement. Une seule fausse note : la consommation, décevante pour une compacte : je n’ai pas réussi à obtenir moins de 9 litres aux 100 kilomètres.
Réduction des coûts oblige, Nissan a cependant poussé le bouchon un peu loin en dotant la Sentra d’un essieu rigide à l’arrière et, surtout, d’un système de freinage mixte (disques à l’avant, tambours à l’arrière). Chiche !
COMPORTEMENT
L’agrément de conduite, ça commence par une bonne direction. Pour ceux et celles qui aiment conduire, il n’y a rien de pire qu’une direction imprécise et surassistée. C’était le cas de la Sentra; ça ne l’est plus. Dans les faits, c'est le jour et la nuit : la direction est ferme, vive et précise, procurant ainsi une conduite enjouée à cette compacte naguère ennuyeuse comme la pluie. La Sentra gagnerait à être mieux chaussée, mais elle montre néanmoins de belles aptitudes : maniabilité, sous-virage et roulis bien maîtrisés, tenue de route sûre, autant de signes qui ne mentent pas sur la qualité du châssis. Cette berline repose sur une base saine, qui sert très bien la version plus sportive (SE-R).
CONCLUSION
La Sentra s’est émancipée, c’est clair. Elle ne passe plus inaperçue et n’a jamais été aussi agréable à conduire. Le hic, c’est qu’elle retire d’une main ce qu’elle donne de l’autre. La réduction des coûts à tout prix se traduit de façon très tangible, que ce soit dans la piètre qualité des matériaux utilisés à l’intérieur, l’assemblage bâclé et le choix de certaines solutions techniques. En gérant « à l’américaine », il se pourrait qu’on finisse par obtenir des résultats « à l’américaine »… Heureusement, la fiabilité semble toujours au rendez-vous, mais c’est aussi le cas de bon nombre de rivales de la Sentra. Cela ne suffit donc plus. On comprend par ailleurs difficilement la stratégie de Nissan avec sa gamme, la Versa cannibalisant les ventes de la Sentra. Bref, pour ce modèle, la menace vient avant tout de l’intérieur.
FORCES
– Bons moteurs
– Boîte CVT bien adaptée
– Bonne direction
– Conduite enjouée
– Toujours fiable
FAIBLESSES
– Finition bon marché
– Lacunes d’assemblage
– Habitabilité moyenne
– Consommation décevante
– Cannibalisée par la Versa
NOUVEAUTÉS EN 2010
Aucun changement majeur (à confirmer)