Espèce menacée
Par Philippe Laguë
Depuis la disparition du Grand Wagoneer, en 1991, Jeep n'avait plus de VUS grand format pour concurrencer les Chevrolet Tahoe, GMC Yukon, Ford Expedition et Toyota Sequoia. Le Commander est donc venu combler ce trou dans la gamme. Manque de pot, il est arrivé tout juste avant les envolées du prix du pétrole et la crise économique. Depuis deux ans, sa mort est annoncée, et pourtant, il est toujours là…
CARROSSERIE
Pour le design, on ne s'est pas cassé la tête : Jeep et les formes carrées, c'est indissociable, et le Commander a toute la grâce et l'élégance du véhicule militaire. Cela dit, la clientèle cible aime cela, alors… Et puis, l’allure cubique est à la mode : qu'il suffise de mentionner, outre la quasi-totalité de la gamme Jeep, les Honda Element et Pilot, le Kia Soul et le bien nommé Nissan Cube. Démodé, le Commander ? Au contraire !
HABITACLE
L’habitabilité de ce gros VUS constitue une déception directement proportionnelle à la taille de la bête. Non seulement faut-il faire attention de ne pas se cogner la tête en prenant place à l’arrière, mais l'espace pour les jambes est également compté. Quant à la troisième banquette, elle est plus décorative qu'autre chose; parlons plutôt de places d'appoint. Quelqu'un peut-il m'expliquer comment il peut y avoir si peu d'espace dans un aussi gros véhicule ?
Au moins, la banquette médiane est confortable, tout comme les sièges avant qui offrent bien peu de maintien latéral. L'habitacle est aussi fort bien insonorisé. Finition et qualité d'assemblage atteignent des sommets; Jeep ne nous a pas habitués à autant de rigueur, c'est même du jamais vu.
MÉCANIQUE
Le Commander emprunte sa plateforme au Grand Cherokee avec lequel il partage également ses deux motorisations. Le V6 est à proscrire; malgré toute sa bonne volonté, ses 210 chevaux peinent à déplacer cette masse de plus de 2000 kilos. Le V8 HEMI de 5,7 litres pourra s'attaquer aux gros travaux avec ses 357 chevaux et, surtout, son couple de 389 livres-pieds. Grâce à son système de désactivation des cylindres, il parvient à limiter (un peu) les dégâts, côté consommation; mais on ne peut que regretter l'absence du V6 diesel de 3 litres d'origine Mercedes-Benz auquel a droit le Grand Cherokee ? Non seulement le couple est-il comparable (376 livres-pieds), mais la consommation est beaucoup plus raisonnable.
Ces deux moteurs peuvent être jumelés à une robuste boîte de vitesses automatique à 5 rapports. Robuste, mais néanmoins raffinée car elle autorise des passages fluides. L'exécution mécanique est d'ailleurs irréprochable dans son ensemble. Évidemment, un Jeep ne serait pas un Jeep s'il n'avait pas quatre roues motrices; trois systèmes d'entraînement sont offerts (Quadra Trac I et II et Quadra Drive II). Peu importe le mode choisi, les capacités hors route des Jeep sont dans une classe à part.
COMPORTEMENT
Ce genre de véhicule, lourd et haut sur pattes, ne peut défier les lois de la physique. Et puis le Commander est un camion, pas une automobile, et il s'assume. Malgré tout, le roulis est fort bien maîtrisé grâce à un système de contrôle antiroulis, et la tenue de route ne réserve pas de mauvaises surprises, pour autant qu'on garde bien en tête qu'on conduit un gros VUS et non une Ferrari. Le travail des trains roulants est à souligner car la grande douceur de roulement contribue au confort exceptionnel de ce VUS. Autre amélioration notable, la direction qui brille par sa précision et sa rapidité d'exécution.
CONCLUSION
Comme tous les gros VUS de son espèce (en voie de disparition), le Commander fait figure d’anachronisme. Pour le rendre plus fréquentable, il aurait fallu une motorisation diesel ou hybride; or, le Commander n’offre ni l’un ni l’autre. Dommage car, dans l’ensemble, c’est un véhicule qui possède de réelles qualités, à commencer par son confort et sa qualité de construction, une rareté chez ce constructeur. À moins que Chrysler ait tout simplement décidé de le laisser mourir de sa belle mort…
FORCES
– Allure militaire (pour ceux qui aiment ça)
– Finition soignée
– Confort étonnant
– Bonne direction
– Moteur volontaire (V8)
FAIBLESSES
– Habitabilité décevante
– V6 inadapté
– V8 qui a soif…
– Pas de version hybride ni de diesel
– Véhicule en fin de carrière
NOUVEAUTÉS EN 2010
– Retrait du V8 de 4,7 L
– Équipement de série plus relevé de la version de base (qui comprend notamment radio satellite Sirius et climatisation arrière)