Le luxe dit intelligent
Par Michel Crépault
Comment convaincre le consommateur de se procurer une auto de 50 000 $ quand on a passé les 25 dernières années au Canada à vendre des véhicules à bon marché ? En offrant un produit irrésistible. La toute nouvelle Genesis représente le pari de Hyundai en matière d'automobile luxueuse et performante. Cette propulsion produite à l'usine d'Ulsan, en Corée du Sud, est offerte sur le marché depuis septembre en configuration V6 ou V8, le premier à nous parvenir de ce constructeur asiatique qui n'a pas l'habitude des cercles huppés.
Carrosserie
Il faut être de mauvaise foi pour dénigrer la silhouette de la Genesis. Conçue par des Coréens qui ont sondé à fond les goûts de Nord-Américains, l'auto s'inspire évidemment des plus belles rivales, comme les Mercedes-Benz (que croyez-vous qu'a fait Toyota quand elle a lancé sa première Lexus, en 1989 ?). Le résultat est absolument plaisant. Au chapitre des dimensions extérieures, la Genesis se situe au milieu du peloton, mais son espace intérieur se compare à celui d'une Mercedes-Benz Classe S, pourtant beaucoup plus longue. Le coefficient de traînée (Cx) de 0,27 est remarquable, à égalité avec celui des Classe E et Lexus GS. Il y a bien une bizarrerie, toutefois. « Nous avons montré la voiture à des acheteurs potentiels. Quand le mot Hyundai n'y figurait pas, les gens se déclaraient prêts à payer un bon prix pour l'auto. Quand nous l'avons montrée avec le nom, cette fois les gens se sont montrés moins enclins à payer autant », nous a dit John Vernile, vice-président au Ventes et au Marketing à Hyundai Canada. Résultat : aucune inscription à l'avant ou sur les flancs et, à l'arrière, on peut seulement lire le nom Genesis suivi de 3.8 ou de 4.6, selon la cylindrée choisie. L'unique référence à Hyundai se limite au logo planté au milieu du coffre et des jantes. À vous de décider : stratégie fondée ou un peu couarde ?
Habitacle
Autant devant que derrière, les places se révèlent confortables. Le coffre offre une capacité adéquate. Mais ce qui m'a surtout agréablement surpris, c'est l'élégance sobre du design et des matériaux qui sculptent l'intérieur. Le tableau de bord mime une vague tranquille festonnée d'interrupteurs ergonomiques. Une influence Lexus est ici détectable. Outre les huit (!) coussins de sécurité gonflables qui truffent l'habitacle, les occupants avant pourront compter sur des appuie-tête électroniques : leurs capteurs les animeront pour minimiser les coups de fouet. L'insonorisation à bord est particulièrement réussie. Toute l'ambiance est abandonnée aux plaisirs de la conversation ou, alors, de la sono. Justement, Hyundai a réussi un coup de maître en con-vainquant le spécialiste, Lexicon, de collaborer à la Genesis. Un exploit car Lexicon s'était jus-qu'ici préoccupée d'une seule automobile : la Rolls-Royce Phantom ! La chaîne avec son d'ambiance qui en découle totalise la bagatelle de 17 haut-parleurs. Un iPod branché au bidule se contrôle au tableau de bord, juste au-dessus de l'écran de navigation dernier cri.
Mécanique
Dans la foulée des arguments qui, selon Hyundai, devraient amener les consommateurs à choisir la Genesis par ce qu'elle représente un choix intelligent, notons que le V8 accepte indifféremment le carburant super ou ordinaire. Cet engin de 4,6 litres est le plus puissant de sa catégorie (375 chevaux, soit 81 par litre, et le 0 à 100 km/h en moins de 6 secondes) mais également le plus frugal à la pompe. De son côté, le V6 Lambda a gagné 3,8 % de puissance (290 chevaux). Il s'accommode également de carburant ordinaire. Selon les dirigeants de la marque, les acheteurs, pour la plupart, se tourneront vers lui. Les deux moteurs sont greffés à une boîte de vitesses automatique à 6 rapports (de marque Aisin pour le V6 et ZF pour le V8) dotée d'un mode manuel Shiftronic. Le freinage a été confié à de gros disques, à un dispositif d'antiblocage et à un système de répartition électronique de la force de freinage.
Comportement
Bon, elle est belle, elle est spacieuse et elle bien équipée, mais se conduit-elle bien ? Lors du lancement organisé en Californie, j'ai fait équipe avec mon ami Benoit pour constater que la réponse, là aussi, résonnait très positivement. Parce que nous sommes tous les deux guidés par une cons-cience professionnelle exemplaire, nous avons soumis la nouvelle venue à des traitements peu orthodoxes, du genre que pas un seul acheteur de Genesis ne fera jamais subir à l'auto. Premier test : sur une route de désert particulièrement déserte, où le mercure flirtait avec les 40 degrés, Benoit a poussé le V8 à plus de 200 à l'heure. Nous avons commencé à sentir un « flottement », une impression d'être moins aimanté au chemin que si nous étions dans, disons, une BMW. Mettez ça sur le compte de la suspension qui, aux quatre roues, fait confiance à cinq bras (la Série 5 et la Classe E préfèrent les fusées MacPherson à l'avant). Un dispositif dit Advanced assure la présence de pistons qui modifie le calibrage des amortisseurs selon l'état de la chaussée. Résultat : la voiture distille un confort perceptible à tout instant. Mais, justement, le confort l'emporte sur la fermeté. On encaisse un effet trampoline sur les chemins vallonnés. Cela dit, aux vitesses légales, les éléments mécaniques contrôlent l'oscillation. C'est comme si le véhicule calculait pour nous la réaction acceptable. La stabilité dynamique a été atteinte grâce à une distribution de poids de 52/48 pour le V6 et de 54/46 pour le V8, alors que l'utilisation stratégique d'un acier résistant a été appliquée à 74 % à la carcasse de l'auto. D'autres tests hors normes se sont déroulés (toujours dans le but de mieux vous informer…) sur la sympathique piste de course de Buttonwillow. Poussés à fond de train dans des virages hautement techniques, les deux modèles ont impressionné par leur aplomb. Ne cherchez pas des couinements à bord pendant qu'on brasse la cage, il n'y en a pas ! Une direction électrohydraulique, dont les sensations sont basées sur la vitesse du véhicule (et non sur les révolutions de l'engin) et l'angle du volant, procure une communication fluide et en temps réel avec le conducteur. En plus, elle contribue pour 2,7 % à une meilleure consommation de carburant. Que ce soit avec le V8 ou le V6, Benoit et moi ne voulions plus quitter la piste