Scène un, prise deux
Benoit Charette
Laissée pour compte, remplacée, réhabilitée, revampée et réinventée. La Ford Taurus est passée par toute la gamme des émotions depuis quatre ans. Laissée à elle-même au moment où Ford a introduit la 500, la Taurus a connu quelques années de vacillement. Devant l’insuccès flagrant de la 500, le patron de Ford, Allan Mullaly, a décidé de ramener la Taurus en raison son passé glorieux. Avec cette toute nouvelle formule en 2010 qui place le véhicule au rang de vaisseau amiral, on peut même parler d’une consécration pour ce modèle qui a marqué l’histoire de la berline de masse chez Ford. Cette nouvelle Taurus incarne ce qu’aurait du être la 500. Disons simplement que le second essai était le bon.
Carrosserie
Avant de jeter un coup d’œil à la voiture, il est important de savoir que cette Taurus devait, à l’origine, être un modèle 2011. Mais devant un marché en déconfiture et un urgent besoin d’un modèle à haut volume, Allan Mullaly a pressé le pas, et la démarche a porté ses fruits. Jamais dans le passé, Ford n’a autant mis à contribution les simulations par ordinateur et la modélisation électronique. Un seul modèle en argile a été produit, tout le reste s’est fait par ordinateur. Le châssis porte le nom de code D3 et a servi de base aux Volvo S80 et XC90 ainsi qu’à la Lincoln MKS. Physiquement, la Taurus 2010 fait preuve d’une recherche esthétique plus poussée, avec en particulier une poupe autrement moins traditionnelle que par le passé. On remarque aussi une ceinture de caisse haute et des optiques avant qui ressemblent à ceux d’une Honda Accord. Les lignes sont brisées par des arêtes dans la carrosserie pour donner un effet à la fois contemporain et trompe-l’œil pour gommer son format imposant. Vous pouvez également choisir des roues de 17 à 20 pouces. La version SHO, qui refait surface après 10 ans d’absence, conserve un profil bas qui la distance peu de la version de base à l’exception du becquet sur le coffre et de la calandre plus agressive.
Habitacle
L’intérieur de la Taurus se situe là où Lincoln était il y a peu de temps encore. Même si les matériaux sont produits à grand volume, ils démontrent une qualité indéniable. Ford a réussi à utiliser un matériau en plastique souple qui imite à merveille le cuir. Ce matériau est coulé sur de véritables matrices en cuir et imite jusqu’à la couture du cuir dans les contre-portes, même approche pour les appliques de bois. La seule différence entre l’intérieur d’une Lincoln et celui d’une Taurus réside dans l’authenticité des matériaux. Chez Lincoln, vous avez du vrai bois et du vrai cuir de recouvrement, alors que chez Ford vous avez ce polyuréthane; mais je vous mets au défi de trouver la différence. Il faut également mentionner toute la technologie embarquée. Ford peut remercier les années de recherche de Volvo en matière de sécurité. Les ingénieurs ont simplement pigé chez Volvo et transférer cette technologie dans la Taurus. Avec les coûts de recherche absorbés, on peut offrir du haut de gamme technologique à moindre prix. Prenons, par exemple, le régulateur de vitesse adaptatif. Il permet au conducteur de choisir sa vitesse de croisière tout en utilisant un système de radar qui surveille la circulation jusqu'à une distance d'environ 200 mètres tout en ajustant la vitesse aux distances de sécurité. Ce système peut également intervenir sur les freins et l'assistance électronique au freinage, une technologie Volvo. Il y aussi le système BLIS pour Blind Spot Information System qui détecte les véhicules dans les angles morts, une technologie développée pour la Volvo S80. On emprunte aussi à Lincoln. La nouvelle Taurus est dotée de l'accès à bord et du démarrage sans clef. Vous pouvez également accéder au véhicule en déverrouillant la porte du conducteur au moyen d'un clavier numérique placé dans le montant de la porte. Le système MyKey™ permet aux parents d'activer un mode de conduite restreint en limitant, par exemple, la vitesse maximale si l’ado de la famille prend le volant. Il y a enfin la dernière génération du système Ford SYNC, un système entièrement intégré de communication vocale et de divertissement qui comporte l'assistance du 911, un rapport sur le bon état du véhicule et un système de recherche de numéros et d'appels fonctionnant avec le GPS. SYNC permet la connexion aux lecteurs MP3, iPod, cartes de mémoire et PDA.
Mécanique
Sous le capot, les modèles SE, SEL et Limited offrent un V6 de 3,5 litres de 263 chevaux. Une mécanique qui a déjà fait ses preuves ailleurs chez Ford. Dix ans après sa disparition, Ford ramène pour cette nouvelle génération de Taurus la belle et puissante SHO. La même mécanique de base trône sous le capot, mais Ford lui a greffé deux petits turbocompresseurs Garrett et porté la puissance à 365 chevaux. Ford a baptisé cette technologie EcoBoost pour signifier que les moteurs turbo vont, à l’avenir, remplacer des cylindrées de plus grandes dimensions pour une meilleure consommation de carburant. Ainsi, l’ancien V8 d’origine Yamaha qui équipait la dernière génération de Taurus est remplacé par ce V6 biturbo. Cette façon de faire s’appliquera également aux moteurs à 4 cylindres très bientôt. La version SE est offerte en traction à 29 999 $ (soit 1 000 $ de moins que l’an dernier). La version SEL est offerte en traction (32 999 $) ou en intégrale (34 799 $), et la version Limited (40 699 $) et SHO (48 199 $) sont livrées en intégrale seulement. Tous les modèles sont jumelés à une boîte de vitesses automatique à 6 rapports avec leviers de sélection au volant (sauf la SE).
Comportement
La première bonne nouvelle réside dans le confort des sièges, même si l’appuie-tête, comme bien d’autres produits Ford, vous chatouille constamment la nuque. On remarque ensuite le silence de roulement. Le moteur se fait discret (un peu trop même), l’espace est généreux, et la visibilité, excellente (sauf à l’arrière). La boîte de vitesses a été pensée pour l’économie; donc quand vous roulez lentement, la voiture peut sembler paresseuse, mais c’est la configuration de la boîte automatique qui agit ainsi pour économiser le carburant; si vous appuyez franchement, la réserve de puissance est bonne. Naturellement, à bord de la SHO, les deux turbos font sentir leur présence en procurant un surplus d’énergie appréciable. La suspension déjà très bonne sur la Taurus devient sportive sur la SHO, et les pneus de 20 pouces GoodYear F1 offrent ce qu’il faut d’adhérence pour suivre la cadence. Donc malgré son format, la Taurus se fait plus petite si vous êtes derrière le volant. Si la caisse est rigide, et la suspension, bien calibrée, la direction est sans vie, quoique précise. La seule limite, si vous poussez la voiture, se trouve dans les pneus d’origine qui limiteront votre élan sur des chemins très tortueux. Le Michelin Energy à faible résistance de roulement ne faisait pas le poids; il faut choisir le Goodyear F1.
Conclusion
Est-ce que cette Taurus va conquérir le cœur des Américains ? Elle a tout ce qu’il faut. Au Québec, les gens attendent plutôt la prochaine génération de Focus et la nouvelle Fiesta, promise pour l’an prochain. Mais la Taurus n’a rien à envier aux grandes berlines.
Forces
Lignes
Avancées technologiques
Confort
Silence de roulement
Coffre généreux
Moteur de la SHO
Faiblesses
Moteur de base qui manque un peu de vie
Direction peu communicative
Limite des pneus de base vite atteinte
Appuie-tête gênant