L’antisportive
Amyot Bachand
Sacrilège, direz-vous, de l’appeler ainsi ? Non. La Viper représente le contraire de ce que les amateurs de voitures recherchent. Elle correspond à un Sylvester Stallone de la route. Puissance brute, carrure gonflée, elle a besoin de beaucoup d’espace sur la route. Et pourtant, j’ai aimé cette brute que Dodge raffine au fil des années.
Carrosserie
La version SRT-10 affiche 100 kilos de moins grâce à l’utilisation de métaux plus légers comme le magnésium. L’on a affiné les lignes de la SRT-10 en abaissant les phares, en polissant les courbes des ailes ainsi que l’arrière des générations précédentes. On retrouve la calandre familière des versions SRT, la division haute performance de Dodge. Les bouches d’aération des panneaux avant et le capot ajouré ne laissent aucun doute sur la masculinité de cette bête de route. La version grise métallique que nous avons testée lui sied bien, plus discrète, mais encore bien sauvage. La capote de toit de ce cabriolet redessiné s’avère une réussite. Bien étanche, elle résiste jusqu’à plus de 200 km/h, m’affirmait l’ingénieur qui m’accompagnait, alors que celle de la génération précédente s’envolait à cette vitesse. Si une version de course vous intéresse, Dodge peut vous fournir un coupé GT prêt pour la piste pour seulement 140 000 $CAN.
Habitacle
Pénétrer dans la Viper demande une gymnastique spéciale, car vous devez littéralement vous asseoir par terre. La position de conduite est aberrante. Les puits d’ailes et le moteur envahissent tellement l’habitacle que vous devez placer vos jambes de biais avec le volant. De plus, le pédalier ne permet absolument pas une utilisation rapide et oubliez le reposepied. Avec la Viper, vous devez réapprendre à passer les six rapports doucement, sinon vous risquez de vous tromper de pédales. Je ne ris pas, c’est sérieux. En revanche, l’instrumentation est parfaitement bien localisée, le compte-tours droit devant vous. J’y ajouterais toutefois un indicateur de vitesse numérique pour une lecture instantanée. Pour ce qui du confort des sièges, il s’avère un peu spartiate malgré leur bon support latéral. Les bourrelets latéraux gênaient mes mouvements lors des changements de rapports ; raison de plus pour choisir le bon rapport et y demeurer.
Mécanique
La beauté de cette machine réside dans son moteur de 10 cylindres. Massif, il ne se cache pas derrière des panneaux de plastique, comme le fait trop souvent la concurrence. On le voit dans son rouge vif : on admire ses 8,3 litres d’où émergeront 500 chevaux bien comptés et 525 livres-pied de couple. N’ayez crainte, Dodge a équipé sa SRT-10 de freins à sa démesure : d’énormes Brembo aux mâchoires rouges qui arrêtent cette vipère en moins de 36 mètres à 100 km/h. La direction a été entièrement révisée et elle s’avère précise et juste assez ferme.
Comportement
J’ai d’abord conduit la Viper sur une autoroute sous la pluie battante pour m’initier à cette machine, la découvrir et m’y adapter : car on doit s’y modeler et non l’inverse. C’est elle qui décide. Sous la pluie, on se contente de frôler l’accélérateur. Puis, j’ai pu la jauger sur une piste sèche. Là elle montre son caractère : pas d’antipatinage, seulement une force brute, mais domptable. Cette fois-ci encore, c’est l’accélérateur qui décide tout : vous dosez vos entrées et vos sorties de virage à l’accélérateur. Les pneumatiques de 19 pouces à l’arrière maîtrisent les glissades et les accélérations. Sur la route, le V10 ronronne allègrement, mais constamment.
Conclusion
Que conclure ? La Viper n’est pas une voiture à mettre entre toutes les mains à cause de la délicatesse de sa position de conduite. À 127 000 $, de toute façon, elle ne s’y retrouvera pas. Mais elle m’a plu pour sa force brute, domptable, mais qui exige le plus grand des respects.
Forces
• V10 • Puissance • Freinage • Pneumatiques
Faiblesses
• Position de conduite • Pédalier • Fermeté des sièges
Nouveautés en 2005
•Deux nouvelles teintes extérieures : orange et jaune
2e opinion Michel Crépault
• Il est de ces voitures qui inspirent le respect dès qu’on se trouve derrière le volant, le moteur en marche. La Viper est l’une de celles-là, indubitablement. Calé dans le baquet sport, on se sent d’abord impressionné par la masse de tôle musclée qui ondule autour de nous. Comme si on allait tirer au poignet avec un haltérophile. Le V10, lui, attend. Il gronde d’impatience. Vous osez lui donner un peu de gaz, il réplique, insulté : «Hé! Arrête de niaiser ! Donne la claque ou débarque ! » Alors, vous donnez la claque. Aussitôt, le monstre se transforme en pieuvre (ventouse), en dragon (chaleur), en guépard (plus de 300 km/h !). C’est beaucoup pour un humble charmeur de serpent…