Amalgame de chevaux et de décibels
Par Michel Crépault
Le jour où les libraires du Québec ont mis en vente L’Annuel de l’automobile 2004, les concessionnaires Acura en faisaient autant avec la nouvelle TL 2004. Leur destin respectif n’est peut-être pas lié, mais le synchronisme était parfait ! La naissance de cette berline remonte à 1995. Le fabricant l’a améliorée en 1998 et a ajouté la version Type S en 2001. Si les générations précédentes définissaient déjà une quatre-portes à la fois luxueuse et performante, la troisième entend pousser ces qualificatifs encore plus loin. De plus, Acura en profite pour la truffer de gadgets dernier cri.
Carrosserie
Chaque fois qu’Acura introduit un nouveau modèle au sein de sa gamme, l’équipe dirigée par Erik Berkman doit hausser le luxe d’un cran. La TL se décline désormais en trois versions au lieu de deux : TL (le gros des ventes), TL Navi Package et TL Dynamic Package. Bye-bye Type S !Il semble que ce constructeur ne puisse renouveler un produit sans choisir une référence inusitée. L’inspiration qui a entraîné la création de la défunte Vigor, par exemple, avait été… un voilier ! On nous a ensuite fait le coup du yacht, de la villa méditerranéenne, etc. Pour ce qui est de la TL 2004, Acura a choisi un joueur de soccer professionnel. « L’athlète suprême », déclare John Ikeda, styliste principal, et n’en déplaise aux fans des autres disciplines. Le designer dit avoir sculpté une automobile à l’image de cette machine à compter des buts. Les puits de roue sont protubérants (muscles en saillie), le nez est pointu (fendre l’air) et l’arrière est massif (solidement relié au sol). De profil, la ligne de toit poursuit une courbe fluide, attestant le coefficient de traînée de 0,29.
Habitacle
On a pris ses distances avec l’habituel océan de chrome et de boiseries, le fréquent apanage des voitures coûteuses. On a plutôt privilégié un sentiment de performance auréolé d’un artisanat minutieux. On souhaite que le pilote ressente immédiatement qu’il est en contrôle d’une puissante machine, mais sans oublier le confort. Le dégagement pour les membres a donc été amélioré; ils sont désormais retenus et soutenus par des baquets plus moulants et mieux rembourrés. Il est en outre possible d’habiller l’intérieur en coordonnant différents coloris, une autre première pour Acura.Honda et Acura retardaient l’introduction au Canada d’un système de navigation parce que les grandes villes du pays n’avaient pas toutes été cartographiées sur disque compact. Là, c’est fait. De plus, le fabricant québécise son produit : le système de reconnaissance de la voix reconnaît le français prononcé à la mode de chez nous.Il ne s’agit pas là de la seule prouesse techno de la nouvelle TL.La magie Bluetooth permet d’utiliser en mode mains libres son propre téléphone cellulaire. Quelques réglages au tableau de bord et, hop, on peut oublier son appareil dans sa poche ou sa valise, il est maintenant relié au système de reconnaissance de la voix, tandis que la conversation passera par les haut-parleurs de l’auto.Mais ces haut-parleurs peuvent faire mieux, beaucoup mieux ! La TL inaugure la première application dans une automobile d’un lecteur DVD-audio en Amérique du Nord. Il s’agit d’un enregistrement qui se rapproche le plus de l’original fait en studio : l’ambiance et le glissement des doigts sur les cordes, le contact de la baguette sur la cymbale. Un enregistrement DVD-audio est 500 fois plus précis qu’un CD.La bonne nouvelle, c’est qu’Acura, de concert avec Panasonic, nous offre de série pareille chaîne audio dans les trois versions de TL. On ne veut plus conduire, on veut écouter ! La mauvaise nouvelle est double. D’une part, le nombre de disques DVD-audio sur le marché est encore restreint (mais ça va changer); d’autre part, ça veut dire qu’il nous faudra éventuellement remplacer tous les CD de notre discothèque par des DVD. Et moi qui commençais à peine à me défaire de mes 33-tours…
Mécanique
Dans le passé, Acura offrait deux versions du V6 VTEC de Honda : un pour la TL de base, l’autre pour la Type S. En 2004, les trois modèles se partageront le même engin. Jeremy Hall, ingénieur en chef pour la conception du moteur et de la boîte de vitesses, concède que le 3,2-litres a été amélioré de façon à permettre à la TL de surpasser les performances de la Type S : les 270 chevaux de la TL 2004 en ajoute 10 à ceux de l’ancienne version. Paradoxalement, on a diminué la consommation et les émissions nocives.La boîte de vitesses manuelle à 6 rapports, qui provient de la CL récemment disparue du catalogue, est au cœur des performances améliorées de la nouvelle TL. Le système VSA (Vehicle Stability Assist), jumelé au système d’antipatinage à l’accélération, permet au conducteur de garder le cap. Les freins avant du Dynamic Package sont maintenant des Brembo, les pneus deviennent des Bridgestone de 17 pouces, et le châssis, en général, a été solidifié. Malgré toutes ces améliorations, la TL 2004, manuelle ou automatique, accuse à peu près les mêmes kilos que la 2003.
Comportement
La TL 2003 traînait de la patte derrière la Lexus ES 300, la Type S faisait mieux et, cette fois, la TL 2004 les éclipse toutes. La version à boîte manuelle est encore plus agressive. En mouvement dans les routes sinueuses et montagneuses de la Californie, la TL 2004 a montré une sonorité plaisante et une nervosité dans la direction qui rend la voiture fébrile, beaucoup plus attachante que sa précédente. Cependant, en accélérations subites, un effet de couple continue d’ennuyer.La comparaison avec le joueur de soccer dépasse la carrosserie et se prolonge dans le comportement. La nouvelle TL freine en criant ciseau (elle s’immobilise de 100 à 0 km/h plus rapidement qu’une Série 5), puis change de cap plus vite qu’une girouette par grand vent. Ses reprises sont explosives à la manière du joueur détalant à fond de train vers le but.
Conclusion
Avant de renouveler son modèle à l’aveuglette, Acura a effectué des études de marché tout en se livrant à une autopsie interne du modèle précédent. Que s’est-il dégagé de tout cela ? L’équipe de la TL chercherait à susciter une émotion auprès du consommateur. « Nous étions trop conservateurs dans le passé », reconnaît Erik Berkman. On a convenu d’améliorer le