J’étais timide, mais je me soigne
P a s c a l B o i s s é
L’ancien Tacoma était aussi discret qu’immuable. On aurait dit qu’il n’avait pas changé depuis des décennies, ce qui, sur le plan mécanique, était un peu vrai. Ce nouveau modèle, entièrement renouvelé pour 2005, est non seulement plus massif que son timide prédécesseur, mais possède maintenant une gueule qui ne laissera personne indifférent. Sa taille a tellement augmenté qu’il rejoint maintenant le Dodge Dakota dans la catégorie des camionnettes intermédiaires.
Carrosserie
Au premier coup d’oeil on remarque la nouvelle carrure du Tacoma. On est aussi immédiatement frappé par l’agressivité de ses formes. Ne trouvez-vous pas qu’il a l’air méchant ? En tout cas, la ligne est très réussie, et ce nouveau Tacoma respire le dynamisme, alors que son prédécesseur était terne et austère. Le Tacoma sera offert en trois configurations : la cabine Accès avec deux portes inversées à l’arrière sera toujours jumelée à une caisse de 6 pieds de longueur, alors que la version Double, avec quatre portes qui s’ouvrent dans le bon sens, se verra dotée d’une caisse de 6 pieds si vous choisissez la boîte automatique ou d’une caisse de 5 pieds si vous préférez la boîte de vitesses manuelle. Oui, vous avez bien lu, mais ne cherchez pas à comprendre, c’est comme ça et c’est tout ! La caisse du Tacoma innove par sa construction en matériaux composites. L’intérieur de la caisse est fait d’un plastique renforcé qui ne rouille pas et permet au Tacoma de sauver quelques kilos. Toyota affirme que ce matériau est plus solide et plus durable que l’acier, mais l’aspect visuel et tactile ne donne pas cette impression. Cette caisse est équipée de rails d’ancrage en équipement de série, et peut même recevoir une prise de courant alternatif 110 volts, pratique en camping ou pour brancher des outils. De petits caissons de rangement peuvent aussi s’intégrer aux parois.
Habitacle
Naturellement, l’habitacle est plus généreux qu’auparavant, tant avec la cabine Accès qu’avec la cabine Double. Même si notre véhicule d’essai était un prototype de présérie et qu’il était bardé d’autocollants nous demandant de ne pas tenir compte de la qualité d’assemblage, disons que ça augure plutôt bien : les matériaux se sont avérés de très bonne qualité et l’assemblage irréprochable. On est chez Toyota, après tout ! Le conducteur est traité aux petits oignons avec de gros cadrans et des commandes claires et faciles à manipuler. Les sièges sont confortables et les ajustements permettent de trouver facilement une bonne position de conduite, d’autant plus que le volant est à la fois inclinable et télescopique. Le dossier du siège du passager peut s’incliner à l’horizontale et les sièges arrière de la cabine Accès cachent d’astucieux rangements. Lorsque ces derniers sont repliés, ils forment une surface parfaitement plate. Le dossier de la banquette arrière de la version Double comporte trois appuietête. C’est judicieux puisqu’on a toute la place nécessaire pour y asseoir trois adultes, mais ça gêne sérieusement la visibilité au moment de faire marche arrière. En plus, Toyota semble avoir oublié d’agrandir la fenêtre coulissante arrière et on a l’impression de regarder à travers un hublot.
Mécanique
Deux moteurs seront offerts, mais il nous a seulement été possible d’essayer le V6 de 4,0 litres qui équipera toutes les versions Double et les Accès à quatre roues motrices. Les modèles à cabine Accès en version « deux pattes » se contenteront d’un petit quatre cylindres de 2,7 litres qui doit se sentir bien seul au milieu de cette grosse carcasse. Le V6 possède toute la puissance et le couple requis, mais sa sonorité à bas et moyen régimes est déplaisante à l’oreille. La boîte manuelle est agréable, mais celui qui a décidé de placer le levier du frein à main sous le volant devrait être fouetté. Essayez de faire un démarrage en côte, avec une lourde remorque accrochée derrière, en tentant de manipuler cette espèce de canne absurde, et vous m’en donnerez des nouvelles. Le châssis est doté de longerons à profil rectangulaire sur toute la longueur, ce qui devient la norme dans cette catégorie. Par ailleurs, la présence de freins à tambours à l’arrière étonne un peu.
Comportement
Puisque nos véhicules d’essai étaient des prototypes, les deux seuls au Canada à ce moment-là, il était hors de question d’aller vérifier les aptitudes du nouveau Tacoma hors des sentiers battus (et asphaltés). Bon, disons que j’ai un peu désobéi en empruntant un chemin de terre pour me rendre dans une carrière et y prendre quelques photos, et cela, malgré les protestations et les regards furieux du représentant de Toyota qui m’accompagnait. Une courte excursion qui m’aura permis de conclure que, même quand il n’y a plus d’asphalte, on a l’impression qu’il y en a encore tellement la suspension se révèle efficace sans être trop souple. Sur la route, on a l’impression de conduire une voiture et, avec son manche court et son maniement précis, le levier de vitesses de la version manuelle se charge de vous faire oublier que vous êtes à bord d’un camion. Le Tacoma, et particulièrement la version à cabine Double, est une grosse bête à manoeuvrer mais son agilité sur les petites routes sinueuses peut s’avérer surprenante. J’ai eu la possibilité de repasser par un tronçon du parcours d’essai plus tard, au volant d’un Toyota Tundra et les deux ne se comparent pas : malgré seulement quelques centimètres en moins, le Tacoma demeure beaucoup plus docile que son grand frère.
Conclusion
Le Tacoma n’a jamais figuré parmi les camions les plus vendus car, mis à part la qualité et la fiabilité propres aux produits Toyota, il n’offrait rien de plus que ses concurrents. Par ailleurs, son prix a toujours été un cran au-dessus de celui des autres. La grande question est maintenant de savoir si Toyota a tiré un numéro gagnant avec son nouveau Tacoma. Certes, il est plus gros et offre un contenu très supérieur à celui de l’ancien modèle, mais il arbore un format inhabituel pour la clientèle visée qui a ses petites habitudes. Et la réponse dépendra certainement du prix qu’exigera Toyota pour ce camion car, s’il est trop élevé, beaucoup d’acheteurs détourneront le regard