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Par : Philippe Laguë
Si Chrysler a su adapter le concept du "gros char américain" à l'an 2000, Ford et encore moins General Motors n'y sont toujours pas parvenus. Même si elle a fait l'objet d'une révision complète il y a trois ans, la Pontiac Bonneville propose du réchauffé, comme c'est trop souvent le cas chez ce constructeur, qui semble prendre les consommateurs pour des idiots. Trop grosse pour rien, trop bardée de plastique à l'intérieur comme à l'extérieur, trop garnie de gadgets inutiles, la Bonneville se résume en un mot : trop.
Carrosserie
Dans sa livrée noire, notre véhicule d'essai ressemblait à une Batmobile à quatre portes, avec ses excroissances de plastique sur les côtés, en avant, en arrière… Dans le genre quétaine, il est difficile de faire mieux (ou pire, c'est selon). Chose certaine, Batman peut envisager de fonder une famille car il dispose désormais d'une berline à quatre portes. Il s'agit par ailleurs de la seule configuration offerte et elle se décline en trois versions (SE, SSEi et SLE). À noter que les Chevrolet Impala et Buick LeSabre sont issues de la même plate-forme. C'est tout dire.
Mécanique
Dire que les motorisations de la Bonneville sont désuètes est un euphémisme. Jurassique serait plutôt le terme approprié pour décrire le V6 à culbuteurs de 3,8 litres, dont l'interminable fin de carrière ressemble à celle d'un vieux crooner confiné aux hôtels miteux de Las Vegas. Pathétique. Ce n'est pas une question de puissance, mais de raffinement. Dans sa version atmosphérique, il développe 205 chevaux et 240 dans sa version suralimentée. Mais l'ensemble moteur-transmission manque de progressivité et de souplesse, comme le confirment les secousses qui accompagnent chaque accélération. Mémo aux "cerveaux" de GM : cessez de presser le citron, il n'a plus de jus ! Avec ou sans compresseur, ce moteur ne parvient plus à cacher son âge. Pour le même prix, la concurrence propose de la mécanique beaucoup plus raffinée.
Comportement
Rendons à César ce qui est à César : la division Pontiac a toujours fait des efforts pour rendre ses voitures plus intéressantes à conduire que leurs clones des autres divisions de GM. La Bonneville ne fait pas exception, en proposant une tenue de route plus agressive, ainsi qu'une direction et une suspension plus fermes. Mais cela ne fait pas d'elle une berline sport, façon BMW; trop grosse et par conséquent, trop lourde, elle n'est pas très agile et elle trahit son poids lors de manœuvres rapides. Malgré le calibrage moins "guimauve" des amortisseurs, le confort – qui demeure la priorité des acheteurs de grosses berlines américaines – ne s'en trouve pas pénalisé. Ou si peu. Chaussées de pneus de 17 pouces, les versions SSEi et SLE n'ont pas la même douceur de roulement que la version de base; sinon, il y a toujours la Buick LeSabre, dont le confort moelleux plaît tant aux octogénaires.
Habitacle
Amateurs de kitsch, bienvenue à bord de la Bonneville, véritable monument psychotronique roulant. Encore une fois, notre justicier masqué se sentira chez lui car la panoplie de boutons, voyants lumineux et autres "bébelles" en tout genre évoque la Batcave. Pour concevoir un habitacle aussi affreux, il faut vraiment le faire exprès et je soupçonne les designers de Pontiac d'être des adeptes de l'humour deuxième degré. Et encore, s'il n'y avait que ça… À l'avant, les baquets fermes et enveloppants ont des formes trop torturées pour être confortables, tandis qu'on ne parvient pas à trouver une position de conduite convenable malgré les multiples réglages des sièges électriques. Ce n'est guère mieux à l'arrière, où le dégagement pour la tête et les jambes est limité. Malgré ses dimensions, ce paquebot est moins spacieux qu'une petite Corolla. Trouvez l'erreur.
Conclusion
Si la Bonneville était une aubaine, on lui pardonnerait (peut-être) quelques-uns de ses défauts. Mais c'est loin d'être le cas : les versions SLE et SSEi coûtent même plus cher que des berlines japonaises comme l'Acura 3.2 TL ou la Nissan Maxima, qui la surclassent à tout point de vue. Le nouveau gourou de GM, Bob Lutz, s'est donné comme mission de redonner à la division Pontiac sa splendeur d'antan. On lui souhaite bonne chance, car il en aura besoin !
Forces
Suspension bien calibrée
Tenue de route surprenante
Confort appréciable
Faiblesses
Allure ringarde
Décoration kitsch à l'intérieur
Manque de dégagement à l'arrière
Mécanique désuète
Mauvais rapport qualité-prix
Vestige d'une autre époque
Deuxième avis : Éric Descarries
Avouez que la Pontiac Bonneville a des lignes plutôt tortueuses de voiture de super-héros à grande cape, surtout dans la version SSEi en noir ! Impressionnante à regarder, mais pas nécessairement élégante. Heureusement que le nouveau président de GM, M. Bob Lutz, n'aime pas les moulures de bas de caisse exagérées comme on en trouve sur la Bonneville. Quand il nous a dévoilé le prototype de la remplaçante de la Bonneville au récent salon de l'auto de Chicago, il a insisté sur la disparition de ces ajouts. Voilà qui est bien!