Épices et crème
Frédéric Masse
Lorsque j’ai pris les clés de la Classe S, j’avais déjà en ma possession une Porsche 911 Carrera S. Imaginez, dans mon entrée de garage se trouvaient, côte à côte, deux magnifiques bolides. Quelle triste vie… Contrairement à mes appréhensions, cette semaine d’essai a été répartie de façon équitable. Le plus fantastique, c’est que ce n’était pas par obligation, mais bien par choix…
Carrosserie
J’ai toujours trouvé le design des S soporifique. Mais cette Mercedes parvient à me garder bien éveillé. Son design est infiniment plus sensuel, voire quasiment sportif: arcs de roues prononcés, phares agressifs, lignes coupées au couteau. Malgré une taille légèrement plus imposante que l’ancienne génération, elle semble d’emblée plus agile. Bref, la S est belle et inspirante!
Habitacle
Prendre place à bord de la Classe S, c’est entrer dans un univers luxueux. Le levier de vitesses, entièrement électronique, est situé derrière le volant. Les matériaux sont nobles, l’insonorisation à la hauteur des attentes. Si jamais le silence vous agace, vous pourrez vous rabattre sur le système de son à 14 haut-parleurs de 600 W. L’habitacle semble immense tout en donnant une impression d’intimité. Cette sensation est probablement attribuables aux baquets avant optionnels qui bénéficient de 16 réglages… oui, 16! et d’une fonction massage. Les places arrière, très accueillantes, permettent de comprendre pourquoi certains acheteurs opteront pour un chauffeur. Le système de contrôle, appelé COMAND, est mieux pensé que le iDrive de BMW et se compare au MMI de Audi. Bien que beaucoup de contrôles soient accessibles à partir de la console centrale, certaines fonctions demeurent complexes. Des commandes simples, comme ajuster le système de son, demandent trop de manipulations, nuisent à la sécurité et font transpirer inutilement!
Mécanique
Les moteurs de la S demeurent les mêmes. Les versions 550 et la 550 4Matic disposent d’un V8 de 382 chevaux à quatre soupapes par cylindre, la 600 d’un V12 biturbos de 510 chevaux tandis que la S65 AMG propose elle aussi un V12 biturbos, mais de 6 litres (604 chevaux et couple de 738 lb-pi). J’ai fait l’essai de la plus clémente 550. Cette Mercedes possède une mécanique particulièrement onctueuse. La transmission automatique à sept rapports (5 pour les version 600 et 65 AMG) accomplit un travail fantastique, et les changements de vitesses sont presque imperceptibles, même en mode Sport qui privilégie les régimes plus élevés et des réglages de suspension plus fermes. J’ai d’ailleurs passé le plus clair de mon temps dans ce mode. Les accélérations demeurent impressionnantes pour une voiture de 2025 kilos, avec un 0-100 km/h sous la barre des six secondes.
Conduite
Pre-Safe, Braketronic, système d’assistance pour vision de nuit, ARCADE, ABC, Airmatic, Distronic, caméra de recul, ESP, BAS, ça vous dit quelque chose? Cet amas de technologies permet aux fortunés propriétaires de se la couler douce au volant ou d’éviter un accident ou, du moins, d’en sortir indemnes. Tout y est, du système qui freine à l’avance grâce à des radars qui perçoivent une collision imminente, au système qui entrouvre une fenêtre après un accident pour permettre une meilleure circulation d’air. C’est bien amusant tout ça, mais la voiture, comment se comporte-t-elle? À merveille. La direction est communicative, quoique toujours plus assistée que celles des BMW ou Audi. La suspension, pneumatique ou pas, combine confort et bonne tenue de route. En fait, l’immense berline donne l’impression d’avoir été coulée dans un seul et même bloc tellement l’ensemble châssis/mécanique est homogène.
Conclusion
La S me semble la meilleure des grandes berlines de luxe. Elle propose un confort au-dessus de la moyenne, des technologies capables de rendre un ingénieur en informatique gaga et un habitacle somptueux. Ce juste équilibre, élément si précieux, est simplement parfait dans ce si savant mélange d’épices et de crème.
Forces
Équilibre parfait entre conduite impliquée et confort journalier Transmission d’une efficacité exemplaire Technologies au service de la sécurité des passagers Design attirant Versions AMG attrayantes
Faiblesses
Options coûteuses et nombreuses Certaines fonctions du système COMAND complexes Technologies de pointe riment souvent mal avec vieillissement
2e opinion Hugues Gonnot
Dans l’histoire de Mercedes-Benz, il y a un avant et un après 1991, année du lancement de la W140, un monstre d’ingénierie où la technologie avait pris le pas sur tout le reste. Le modèle W220 de 1999 n’était guère mieux: c’était un caisson d’isolation sensorielle. Avec l’actuelle génération, W221, n’allez pas croire qu’il y a moins d’électronique, il y en a plus que jamais! Mais elle semble mieux intégrée, nettement moins gadget, et le conducteur semble avoir repris ses droits. Se taper l’épais manuel d’instruction sera un mince prix à payer pour pouvoir bénéficier d’un moteur somptueux, d’une boîte sept vitesses parfaite, d’un confort souverain et d’une ligne à nouveau expressive. Il paraîtrait même que la fiabilité serait en progrès… À suivre!