L'euroberline
Par : Luc Gagné
Bruxelles est une agglomération de 19 communes où vivent près de un million de personnes. C'est aussi la capitale du Royaume de Belgique, siège des communautés française et flamande, et siège de la Commission et du Conseil de l'Union européenne. Pourtant, son salon de l'auto qui se tient en début d'année est inconnu hors de l'Europe. C'est pourtant là que Mercedes-Benz a choisi de dévoiler sa nouvelle Classe E, en janvier 2002. Une voiture dont le développement a nécessité deux milliards d'euros (environ autant de dollars américains) en investissements. Euros… Bruxelles… vous aurez sans doute compris l'allusion. Choisir le lieu de naissance de la nouvelle monnaie unique créée par la Communauté économique européenne, dont le siège est justement à Bruxelles, pour une voiture qui s'est appropriée la lettre " E " en 1993 en guise de dénomination, voilà qui était tout naturel. Une " euroberline ". Or, l'arrivée d'une nouvelle classe E constitue un événement en soi. Selon le pays, ce modèle assure entre 24 et 40 % des ventes annuelles de la marque. Soumis à une féroce concurrence de la part de BMW et d'Audi, les stratèges de Mercedes-Benz misent donc, pour cette nouvelle génération, sur un niveau de raffinement et de sophistication encore plus élevé.
Carrosserie
En 1995, la précédente génération de Classe E avait établi le style nouveau du constructeur de Stuttgart, avec ses projecteurs à lentilles elliptiques. Or, la nouvelle poursuit dans le même sens. Au premier coup d'œil, on croirait même apercevoir une petite Classe S. La calandre arbore quatre phares ovales. Plus inclinés, ces projecteurs utilisent des diffuseurs de verre transparent, qui mettent en valeur le système complexe d'optiques. Ils s'harmonisent à la forme plongeante de la voiture, qui affiche fièrement son Cx de 0,27 (contre 0,29 pour l'ancien modèle). Les clignotants intégrés aux rétroviseurs rappellent aussi la S, de même que la proue profilée tout en rondeurs. Par rapport au modèle qu'elle remplace, la nouvelle E a gagné quelques " petits " centimètres, çà et là : 2,1 centimètres d'empattement, 1,3 de hauteur et 2,3 de largeur. La longueur reste inchangée. Ces cotes supérieures se reflètent dans l'espace utile de l'habitacle. La nouvelle Classe E gagne à l'avant, de l'espace pour les épaules et les jambes (mais en perd pour la tête, en raison du toit ouvrant), et derrière, pour la tête, les épaules et les jambes. L'aire de chargement croît également de 3,6 %. Cette refonte affecte également le châssis, déjà très rigide, dont la résistance à la torsion a été augmentée de 18 % – une rigidité qu'on perçoit aisément sur route cahoteuse. Le diamètre de braquage a augmenté légèrement, passant de 11,3 à 11,4 mètres, sans causer de handicap. Car, pour une voiture de 4,8 mètres, il est très satisfaisant. Prenez la Cadillac Seville, plus longue de 0,3 mètre qu'une Classe E, elle a un diamètre de braquage supérieur de 0,9 mètre ! La Classe E est à peine plus lourde que sa devancière (de 22 à 45 kilos selon le modèle). Elle fait d'ailleurs usage de plus de matériaux légers, entre autres, l'aluminium. Ce métal sert à 10 % des composants de la voiture, entre autres pour le capot, les ailes avant et le couvercle du coffre. Une solution avant-gardiste pour éviter l'augmentation de la masse du véhicule, qui requiert néanmoins la formation d'une nouvelle main-d'œuvre spécialisée en tôlerie chez les concessionnaires, sans oublier l'outillage nouveau nécessaire à la réparation de ces pièces.
Mécanique
La gamme de la Classe E comprend deux berlines distinctes par leur mécanique et déclinées en trois variantes : Classic (qu'on reconnaît aux boiseries d'eucalyptus), Elegance (boiseries de ronce de noyer marron) et, la plus cossue, Avantgarde (boiseries d'érable noir). La nouvelle E320 reprend le V6 de 3,2 litres du modèle antérieur. Fort de ses 221 chevaux, son constructeur affirme qu'il consomme désormais 0,9 litre aux 100 km de moins que la version 2002, grâce à un nouveau système sophistiqué d'épuration des gaz. La E500, qui remplace la E430, dispose d'un nouveau V8 de 5 litres. Ce moteur produit 302 chevaux, soit 27 de plus que celui qu'il remplace. Son couple supérieur (339 livres-pied) avec un régime plus étalé de 2700 à 4250 tours; le V8 de 4,3 litres de la E430 développait ses 275 livres-pied entre 3000 et 4000 tours. On retire une souplesse accrue et des reprises titanesques, quelle que soit la vitesse à laquelle on roule. N'allez pas croire que le V6 soit amorphe pour autant. Après tout, 7,7 secondes suffisent à propulser les 2170 kilos de la E320 à 100 km/h. La boîte automatique à cinq rapports " Touch Shift " transmet cette puissance avec douceur aux roues arrière. Une boîte qui procure aux amants de boîtes manuelles le sentiments de " jouer " au Fangio, en utilisant son mode séquentiel – pseudo manuel, si vous préférez.
Comportement
Car la Classe E offerte au Canada est une berline de tourisme passionnante à conduire. L'aisance avec laquelle elle se comporte sur la route fait fi de sa masse relativement importante. Sa suspension indépendante aux quatre roues, nouvelle pour 2003, utilise sur la E320 deux combinaisons de liaisons multiples, devant et derrière. La E500, par contre, bénéficie d'une nouvelle variante de la suspension pneumatique Airmatic, utilisée sur la Classe S depuis 1998. Le système de la E régularise à la fois le taux d'amortissement, par la variation de la pression des amortisseurs, et la fermeté de la suspension avec des soufflets gonflés d'air jumelés aux ressorts. Des variations continues obtenues grâce à des données colligées par une batterie de capteurs mesurant l'angle de braquage des roues, l'accélération latérale, l'angle de lacet et le régime du moteur. Avec l'Airmatic, la E500 est étonnamment stable à l'accélération comme dans les parcours sinueux. La servodirection à crémaillère est légère, même surassistée. L'amateur de conduite qui sommeille en nous aimerait sentir davantage la route. Quatre grands disques assurent un freinage remarquablement équilibré, géré par un système électrohydraulique appelé SBC (pour Sensotronic Brake Control). Première étape vers l'intégration de la technologie " Brake By Wire ", ce système fait qu'un micro-ordinat