Qui s'ennuie du Cherokee ?
Par : Philippe Laguë
Le Cherokee est un nom mythique chez Jeep, au point où on l'a même conservé pour le marché européen. Mais en Amérique, son successeur s'appelle Liberty. De gros souliers à chausser, croyez-vous ? Ce serait plutôt le contraire : le Cherokee avait fait son temps, au point de paraître désuet face à ses rivaux. Le Liberty a cependant tout ce qu'il faut pour permettre à Jeep de redevenir la référence de ce créneau en pleine expansion.
Carrosserie
Comme la presque-totalité de ses rivaux, le Liberty se limite à une seule configuration (à 4 portes), qui peut recevoir deux habillages (Sport et Limited). La carrosserie est inspirée du véhicule-concept Dakar, qui date de 1997. Si ce dernier ressemblait à un TJ auquel on avait ajouté deux portières supplémentaires, le Liberty possède une allure plus distincte, avec ses formes sculptées. Les gros phares ronds et les sept barres verticales de sa calandre respectent cependant la tradition Jeep. Il en résulte un design très réussi, qui n'aura aucune peine à faire oublier cette boîte à quatre roues qu'était le Cherokee.
Mécanique
Offert en série sur la version de base (Sport), le 4 cylindres de 2,4 litres affiche une puissance adéquate si on le compare à ceux des CR-V, Forester et autres RAV4. Le hic, c'est que le Liberty pèse quelques centaines de kilos de plus, de sorte que les 150 chevaux suffisent tout juste à la tâche. Toutes les raisons sont bonnes pour se tourner vers l'autre motorisation, un V6 de 3,7 litres. Élaboré à partir du V8 de 4,7 litres du Grand Cherokee, il génère 210 chevaux, ce qui en fait l'homme fort de sa catégorie. Il a du couple à revendre, tandis que sa capacité de remorquage est sans égale parmi les VUS (véhicules utilitaires sport) compacts. Comme un culturiste, ce moteur a beaucoup de muscles mais il manque de souplesse. Il ronronne doucement à vitesse de croisière mais il émet un grognement sourd dès qu'on accélère. Ne réveillez pas l'ours qui dort ! On constate par ailleurs la relation symbiotique entre ce moteur et la boîte de vitesses automatique. Dire que j'ai été impressionné serait un euphémisme : cette transmission travaille en douceur, autorisant des passages fluides tout en assurant une réponse immédiate, sans aucun creux ni à-coup. Une boîte manuelle est aussi offerte, mais elle ne peut être jumelée qu'au 4 cylindres. Côté freinage, on remarque une nette amélioration par rapport au Cherokee. Il n'était pas difficile de faire mieux, c'est vrai; mais là, c'est vraiment le jour et la nuit ! La suspension constitue un autre des points forts du Liberty. Pour la première fois, un Jeep est muni d'une suspension indépendante à l'avant, tandis qu'à l'arrière, on a conservé la configuration à essieu rigide, avec des ressorts hélicoïdaux. L'efficacité des trains roulants se vérifie dans toutes les situations, sur la route et hors-route. Malgré une vocation utilitaire plus marquée que celles de ses concurrents, le Liberty procure un confort appréciable, tandis que ses habiletés de tout-terrain le placent dans une classe à part.
Comportement
Encore une fois, le Liberty se situe à des années-lumière du Cherokee. Et encore une fois, c'est une bonne chose ! Le roulis est fort bien maîtrisé, tandis que l'avant ne plonge presque pas au freinage. Pour un VUS haut sur pattes, c'est impressionnant. Quant à la douceur de roulement, elle fera des envieux chez les propriétaires de TJ, tout comme la tenue de route… Pour les excursions hors-route, il faudra cependant choisir les bons pneus. Ceux de la version Limited sont avant tout destinés à un usage routier, d'où le confort qu'ils procurent. Mais si vous voulez jouer à l'aventurier, vous risquez de trouver le temps long…
Habitacle
En matière de décoration intérieure, l'habitacle du Liberty est difficile à battre. Les cadrans à fond blanc du tableau de bord, les placages de couleur argent qui ornent la console, tout ça est très agréable à l'oeil. L'ergonomie, comme la finition, se méritent également une très bonne note. Note qui serait parfaite n'eût été des sièges, qui déçoivent par l'absence de support latéral. En revanche, personne ne sera à l'étroit à bord du Liberty. Que ce soit pour la tête, les épaules ou les jambes, le dégagement ne manque jamais. Soulignons, en terminant, le rendement exceptionnel de la chaîne stéréo, une constante à bord des véhicules Chrysler, Dodge ou Jeep.
Conclusion
De son prédécesseur, le Liberty n'a conservé que les qualités, soit la robustesse et de véritables capacités de tout terrain. Contrairement à la plupart de ses concurrents, le Jeep n'est pas un utilitaire de banlieue. Pourtant, il n'a rien à leur envier au chapitre du confort et du raffinement. De là à dire qu'il surpasse tout le monde, il n'y a qu'un pas que je franchirais allègrement si ce n'était de la fiabilité, un domaine où Jeep n'a pas encore fait ses preuves.
Deuxième avis : Éric Descarries
Le nouveau Liberty ne fait pas l'unanimité au sein des amateurs de Jeep. On lui reproche sa suspension avant indépendante qui peut lui nuire en situation hors route. Personnellement, je me suis déjà pris une souche morte dans un bras inférieur de suspension avec un Liberty, et je dois leur donner raison. Mais sur la route et en ville, j'ai adoré ce petit véhicule qui a une personnalité bien à lui. Sa direction est précise; le confort et le silence sur autoroute m'ont tout simplement étonné. Le Liberty remplace avec beaucoup de brio l'ancien Cherokee qui, avouons-le, avait fait son temps !