Déjà la fin
Par Philippe Laguë
Modèle mythique de l’industrie automobile américaine, la Thunderbird vient tout juste de renaître que, déjà, on annonce sa fin imminente. Elle n’aura vécu que trois ans, 2004 étant sa dernière année de production. Dommage, car Ford avait grand besoin d’une voiture de prestige pour redorer son blason. Les difficultés financières de la firme de Dearborn auront toutefois précipité le sacrifice de la « T-Bird » sur l’autel de la rentabilité, un sort qu’elle ne méritait aucunement.
Carrosserie
La Thunderbird doit sa renaissance au crayon très inspiré du styliste J. Mays, grand prêtre du néo-rétro. Avant d’occuper le siège de directeur du design chez Ford, Mays officiait chez Volkswagen, et c’est à lui qu’on doit la New Beetle. Rien d’étonnant, donc, à ce qu’il ait réussi un autre coup de maître avec la Thunderbird en s’inspirant de la première du nom (1955). Elle reprend d’ailleurs la même architecture avec son habitacle à deux places, son moteur à l’avant et ses roues motrices à l’arrière. Comme son ancêtre, la « T-Bird » du 21e siècle séduit par son élégance. Ce superbe roadster ne passe pas inaperçu, car ses lignes très pures font tourner les têtes. Quelle gueule, non mais quelle gueule !
Habitacle
L’habitacle a fait l’objet d’une restylisation l’an dernier. Le tableau de bord en est le principal bénéficiaire, avec de nouveaux cadrans à fond blanc cerclés de chrome, qui ajoutent une touche de classe. La sellerie de cuir respire la qualité tandis que le dessin rétro des sièges s’harmonise avec l’ensemble. Bref, la Thunderbird est aussi belle à l’intérieur qu’à l’extérieur. Elle mériterait cependant une finition plus rigoureuse : plusieurs craquements émanent du toit mais aussi de la planche de bord.
Mécanique
Comme son aïeule, cette décapotable typiquement américaine est mue par un V8, qui se retrouve également sous le capot de la Lincoln LS. Celle-ci partage d’ailleurs sa plateforme et ses organes mécaniques avec la Thunderbird. On reprochait à ce V8 de 3,9 litres de manquer de « oumph », mais les motoristes de Ford ont corrigé la situation en lui insufflant 28 chevaux supplémentaires. Le couple a suivi, lui aussi, la courbe ascendante, et cela se traduit par des accélérations et des reprises musclées qui rendent la « T-Bird » beaucoup plus grisante à conduire. La boîte automatique semble mieux adaptée, moins caractérielle, que celle de la Lincoln LS, mais elle demeure lente. Le mode séquentiel Selectshift, offert en option, permet des passages plus rapides, mais son exécution manque de raffinement. N’allez surtout pas payer un supplément pour ça.
Comportement
À l’origine, la Thunderbird, faut-il le rappeler, se voulait la réplique de Ford à la Chevrolet Corvette. Malgré une architecture identique, ces deux roadsters possédaient toutefois une personnalité bien distincte : la Corvette affichait ouvertement ses prétentions sportives, tandis que la « T-Bird » était plutôt une boulevardière – un cruiser, comme disent les Américains. Près d’un demi-siècle plus tard, leur vocation respective n’a pas changé. Avec la Thunderbird, on a envie d’enfiler les kilomètres, tout en prenant le temps d’admirer le paysage. Sa suspension absorbe bien les bosses et les trous de notre réseau routier tiers-mondiste et lui confère une douceur de roulement exceptionnelle. Dans les grandes courbes, le roulis est bien maîtrisé et la « T-Bird » montre un aplomb rassurant, bien servie par une excellente direction aussi rapide que précise. Mais elle n’aime pas qu’on la brusque : son amortissement très souple entraîne alors un tangage très prononcé. Ses dimensions et son poids imposent aussi certaines limites. Mais quel confort ! Aussi bien conduire relax pour en profiter…
Conclusion
Admirateur inconditionnel de la « T-Bird », je serai de ceux qui verseront une larme lorsqu’elle sera mise à mort… pour une deuxième fois. Jamais deux sans trois ?
Forces
Classe et élégance indéniables Sièges confortables Accélération et reprises grisantes Direction précise Douceur de roulement exceptionnelle Classique en devenir
Faiblesses
Finition légère Boîte automatique lente Boîte Selectshift décevante Tangage sur mauvais revêtement Dernière année de production (snif !)
Nouveautés
Nouveaux sièges
Éric Descarries 2e opinion
Je ne suis pas certain que Ford a visé dans le mille avec la Thunderbird. Certains journalistes l’ont trouvé laide, d’autres, très belle. Quant à moi, elle m’a laissé un peu indifférent. Cependant, je dois admettre que la toute dernière livrée est plus agréable à regarder avec ses nouvelles roues en alliage et, surtout, ses nouvelles couleurs moins criardes. Le V8, maintenant plus puissant, est certes plus agréable et correspond plus à l’image de la voiture. La T-Bird peut être un excellent choix pour ceux qui veulent un beau roadster très confortable sur de longues distances. Cependant, je persiste à croire que l’effet aurait été plus réussi si la Thunderbird rétro avait été conçue sur une base de Mustang Cobra !