Un classique en devenir
Par Philippe Laguë
Introduite en 1975, la Cadillac Seville a connu une carrière en montagnes russes, avec certaines descentes particulièrement abruptes. Depuis une dizaine d'années, soit depuis l'arrivée de la quatrième génération, en 1992, elle s'est cependant métamorphosée, au point de devenir une rivale potentielle pour les berlines de luxe importées. Cette progression vers le haut s'est poursuivie lors de la refonte suivante, en 1998.
Carrosserie
Au plan esthétique, on a suivi une démarche évolutive. Avec bonheur, semble-t-il, puisque la carrosserie de la Seville a su vieillir en beauté, et ce, même si ses grandes lignes ont été dessinées il y a plus de dix ans. La barre sera haute pour sa remplaçante.
Habitacle
Lors de la dernière refonte, il y a cinq ans, la plupart des lacunes affligeant l'habitacle ont été corrigées. Débarrassé de l’affichage numérique, le tableau de bord a pris du mieux avec une instrumentation moins confuse, faite de cadrans électroluminescents (façon Lexus) qui, le soir venu, arrachent des oh ! et des ah ! aux passagers. Effet garanti. Côté rangement, on est passé d'un extrême à l’autre, puisque c’est désormais l’abondance, en quantité comme en capacité. Quant à la finition, celle de notre véhicule d’essai était impeccable. En ce qui a trait au confort, on pourrait difficilement demander mieux. Aussi spacieuse que cossue, cette berline dorlote particulièrement ceux qui prennent place à l’avant, avec des sièges baquets qui épousent la morphologie de leurs occupants. Ce n’est pas une figure de style : une technique sophistiquée de rembourrage fait en sorte que les sièges en question s’ajustent au gabarit de la personne qui s’y installe.Mais passons tout de suite au dessert : la chaîne audio. Alors là, mes amis, on a frappé un grand coup. L’ensemble haute fidélité, conçu avec la collaboration de Bose, ne mérite que des éloges. Le mélomane que je suis n’en est toujours pas revenu, tout comme les audiophiles consultés, à qui votre serviteur s’est fait un devoir de faire une démonstration.
Mécanique
Restons dans les superlatifs, puisque le moment est venu de parler moteur. Avec le V8 Northstar, les ingénieurs de Cadillac peuvent se targuer d’avoir conçu l’une des meilleures motorisations du monde, rien de moins. Comme seule la version SLS demeure pour 2004, le moteur de 275 chevaux est le seul disponible. Les accélérations franches, les reprises fulgurantes et le couple généreux de ce V8 ont, par ailleurs, valu à la Seville le surnom de « Corvette à 4 portes », ce qui en dit long sur ses prestations.Cette cavalerie fait toutefois craindre le pire quand on sait que la Seville, contrairement à ses rivales importées, est une traction et non une propulsion. Encore là, les ingénieurs ont réussi du beau travail, puisque l’effet de couple, bien que perceptible, est assez bien maîtrisé. Mais il est toujours présent. On se surprend à rêver d’une version intégrale… La boîte de vitesses Hydramatic gère cette puissance avec brio, et l’on ne peut vraiment pas lui reprocher grand chose, si ce n’est l’absence d’un 5e rapport, comme le veut la tendance dans le segment des berlines de luxe. Sinon, elle passe les rapports en douceur, mais réagit promptement quand besoin est, et l'on tire un certain plaisir à la piloter de façon manuelle, après avoir, au préalable, sélectionné le mode Sport.
Comportement
On peut désormais avoir du plaisir à conduire une Cadillac. À ce chapitre, la Seville aura été la première à distiller autre chose que l'ennui à son volant, et sa conduite s'est encore améliorée lors de l'introduction de la suspension Magnetic Ride. Celle-ci ne mérite que des éloges, tant pour sa sophistication que pour son rendement.
Conclusion
Moins chère que la plupart de ses rivales, la Seville n’a pourtant rien à leur envier, possédant même une qualité de plus en plus rare : du tempérament. La meilleure voiture jamais construite en Amérique, dites-vous ? Oui, et aussi l'une des plus belles. Un classique, assurément.
Forces
Une réussite esthétique Son habitacle cossu et spacieux Sa finition irréprochable Sa chaîne stéréo impressionnante Son excellent moteur
Faiblesses
L’effet de couple toujours présent Sa suspension flasque Une faible valeur de revente Un modèle en fin de carrière
Nouveautés
Fin de production du modèle STS Nouvelles couleurs : platine clair et blanc cotillon
Éric Descarries 2e opinion
La Seville vit ses dernières heures. Comme bien des produits GM, elle aura admirablement servi sa cause. Symbole de puissance et de luxe contemporain, la Seville commence à accuser de l’âge. Malgré tout, son puissant moteur V8 continue d’impressionner par ses performances étincelantes. Mais la plateforme est de plus en plus dépassée. La Seville a toujours attiré une clientèle d’approche plus jeune, et sa remplaçante, actuellement à l’étude, devra en faire autant. Dans le milieu, on chuchote la disparition du nom Seville au profit de trois lettres comme le veut la nouvelle tradition de Cadillac. C’est un peu dommage, car le nom Seville imposait un certain respect. Mais que voulez-vous, on n’arrête pas le progrès.