Fidèle à la tradition
Philippe Crowe
Ça y est, GM a décidé que les noms Century et Regal avaient fait leur temps et les relègue aux oubliettes. On a choisi le nom LaCrosse pour identifier cette berline sur le marché américain, sans penser à la connotation vulgaire du nom en français. Après maintes discussions, le nom Allure a été choisi pour le marché canadien. GM espère attirer des acheteurs un peu plus jeunes que la clientèle du duo précédent sans irriter les propriétaires actuels prêts à changer. La voiture affiche une nouvelle allure, certes. Mais la plateforme demeure celle de l’ancienne génération. Heureusement, plusieurs améliorations y ont été apportées, et ce, à tous points de vue. Trois niveaux de finition sont offerts, soit la CX (25 200 $) qui fait office de version de base, la CXL (27 865 $) qui offre un équipement relevé et la CXS (33 265 $), modèle à la fois « sportif » et luxueux.
Carrosserie
Évidemment, c’est sur le plan du design extérieur qu’on constate d’abord les changements. La calandre ovale et chromée proéminente, caractéristique de Buick, constitue le centre visuel de l’avant, secondée par une paire de phares de chaque côté. La ligne de capot bombée et fuyante allant rejoindre les phares donne un petit air cartoonesque aux extrémités avant de la voiture que les designers auraient voulu voir associé à Jaguar… Raté. On pense plutôt à Roger Rabbit. Seul un regard très furtif permettra de déceler une ressemblance avec l’inspiration des stylistes, mais ce regard devra vraiment éviter de s’arrêter. La ligne de toit offre une image typique des berlines sans trop d’originalité. Stationner l’Allure à côté d’une Ford Taurus permet de réaliser que la pente du pare-brise, la ligne de toit et la courbure des glaces latérales sont semblables. Curieux et inquiétant. Je ne pensais pas que les acheteurs de Buick cherchaient une Taurus. L’arrière se révèle plus harmonieux et intègre bien l’ovale Buick dans la tôle du couvercle du coffre pour incorporer écusson Buick en son centre. L’ensemble arrière offre un style un peu banal, mais plaisant pour l’oeil et efficace, permettant d’offrir un coffre de bonne taille. Vu de trois quarts, on remarque des épaules d’ailes soulignées par une arête courbe très marquée qui donne de la vigueur à l’ensemble, mais elles sont malheureusement timides sur les ailes avant. Est-ce que le styliste de la partie arrière a parlé à celui de la partie avant ?
Habitacle
Première non-surprise en s’asseyant dans l’Allure: la planche de bord, quoique efficace, reste très « planche » et ne bouscule pas l’esprit Buick. Les instruments sont lisibles et bien disposés, tout comme les différentes commandes d’accessoires. Seules les commandes de la ventilation sont placées un peu trop bas. Ce n’est pas un problème dans la version de base, mais cela devient nuisible avec le système de ventilation géré électroniquement. La qualité des matériaux est en hausse ce qui contribue à rendre l’ambiance à bord feutrée et confortable. Tant les plastiques des panneaux de portes que ceux de la planche de bord sont agréables au toucher et visuellement attrayants. Une quasi-réussite, mais GM gâche tout avec un volant dont la texture plastique semble provenir d’une Sunfire d’il y a sept ou huit ans. Ouch! Heureusement qu’on peut opter pour une version recouverte de cuir. La disposition des sièges avant permet d’offrir une voiture à cinq ou six places. Dans le cas de la six places, l’accoudoir est en même temps un grand espace de rangement qui se replie sur lui-même pour servir de siège central. À ne conseiller que pour des enfants sur de courts trajets. Avec cette configuration de sièges, le levier de changement de rapports est situé sur la colonne de direction, comme dans le bon vieux temps. Les sièges avant de la version de base demeurent confortables lors de longs trajets et, pour une Buick, offrent un maintien très acceptable. Curieusement, ces mêmes sièges tendus de cuir s’avèrent inconfortables à la longue. L’assise des sièges, longue, supporte bien le dessous des jambes ; très bien pour les grandes personnes, mais cela risque de déranger les plus petites. On découvre une bonne position de conduite, très bonne même, grâce à une colonne de direction ajustable en hauteur et télescopique, à un pédalier ajustable et à la possibilité de varier la hauteur et l’angle du siège. Par contre, il est toujours surprenant de trouver une poignée de contrôle manuel de l’angle du dossier sur un siège électrique.
Mécanique
Deux moteurs sont offerts. La CX et la CXL se partagent le V6 3800 série III, le fiable et presque éternel moteur à culbuteur de 3,8 litres que GM utilise à toutes les sauces. Les 200 chevaux de ce moteur s’avèrent adéquats et la voiture ne se traîne pas. Par contre, les rapports de la transmission semblent un peu longs. La CXS a droit à un moteur techniquement plus évolué, un 3,6 litres de 240 chevaux et 225 livres-pied de couple avec double arbre à cames en tête, quatre soupapes par cylindre et le calage variable en continu des soupapes. Ce moteur est à la fois plus vigoureux et moins dérangé par la longueur des rapports de la boîte, tout en demeurant aussi silencieux que le 3,8 litres. Il est bien adapté à la voiture. La puissance est transmise aux roues avant, comme pour toutes les voitures basées sur la plateforme W, et le système de contrôle de la traction se révèle efficace.
Comportement
C’est du côté du comportement que le conducteur découvre la grande surprise de la voiture. Disparu le pompage de la suspension à la moindre bosse, au moindre vallon. Les ingénieurs de Buick ont su recalibrer l’ensemble du train roulant pour offrir une tenue de route saine, confortable à la Buick, mais sans que la voiture ne tangue ou ne valse inutilement. La seule mauvaise note vient des pneumatiques de base qui émettent plus de bruits de roulement qu’ils ne devraient le faire, sans se montrer très adhérents. À changer au plus tôt.
Conclusion
Buick a certes fait un pas dans la bonne direction avec cette évolution. L’Allure est une voiture calme, silencieuse et confortable si on prend le temps de bien choisir les options. Tristement, GM a conservé une plateforme techniquement dépassée alors qu’il y en a tant d’autres disponibles, l’Epsilon de la Malibu par exemple, qui aurait permis à la voiture d’atteindre réellement le niveau de la concurrence. Résultat, une bonne voiture qui se retrouvera fort prob